Le Comité National des Femmes Socialistes condamne fermement la décision du gouvernement CSV/DP de ne pas prolonger le délai légal d’avortement de 12 à 14 semaines. Cette décision est décevante après une première étape que nous saluons expressément dans ce dossier, à savoir l’abolition du délai de réflexion obligatoire de trois jours entre la consultation légale et l’acte de l’IVG.
Dans un contexte où nous observons une montée inquiétante des mouvements antiféministes et des tentatives de remise en cause des droits durement acquis en matière d’égalité des genres, il est impératif que le Luxembourg adopte une posture forte, claire et progressive. Le gouvernement doit renforcer les droits des femmes à disposer de leur corps et à décider librement pour elles-mêmes.
Prolonger le délai légal d’avortement, c’est offrir aux femmes non seulement davantage de temps pour exercer leur libre choix, mais aussi garantir une liberté essentielle à celles qui découvrent leur grossesse ou prennent leur décision après la 12ᵉ semaine.
En fixant un délai strict, on limite leur liberté de choix, particulièrement dans des situations où des contraintes médicales, personnelles ou organisationnelles compliquent leur accès à l’IVG. Prolonger le délai n’est pas une concession, mais une reconnaissance concrète de leur autonomie et de leur droit à gérer les situations complexes qui impactent profondément leur vie.
Les arguments qui sont en faveur de cette prolongation sont multiples : tout d’abord il existe un risque accru que des femmes découvrent leur grossesse tardivement, qu’il s’agisse de femmes ayant des cycles menstruels irréguliers ou de femmes vivant des situations de précarité. S’ajoute à cela que les procédures telles que la réalisation d’examens nécessaires peuvent également mener à un dépassement du délai de 12 semaines.
Une prolongation du délai serait cohérente dans une dynamique d’harmonisation avec les pratiques européennes : La France (14 semaines) et les Pays-Bas (24 semaines) ont adopté des délais plus longs pour garantir aux femmes un accès sécurisé à l’IVG. En maintenant un délai plus court, le Luxembourg risque de pousser des femmes à devoir se déplacer à l’étranger pour accéder à ce droit, ce qui génère des coûts et un stress inutiles.
D’autant plus, une prolongation du délai permettrait la détection de maladies graves : en effet certaines anomalies chromosomiques ou malformations fœtales ne peuvent être détectées qu’après un certain délai comme par exemple, les tests prénataux non invasifs (NIPT), disponibles à partir de la 10ᵉ semaine, dont les résultats sont envoyés uniquement au médecin prescripteur sous 7 à 10 jours après réception des échantillons sanguins par le LNS.[1] Les échographies détaillées ou les amniocentèses, effectuées plus tard, peuvent également révéler des problèmes médicaux graves. Refuser de prolonger le délai prive les femmes de décisions éclairées dans de telles situations.
Finalement prolonger le délai légal contribuerait aussi à prévenir les avortements clandestins. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), les avortements non sécurisés sont une cause majeure de mortalité maternelle. Un délai plus long limite ces risques en offrant un accès sécurisé à l’IVG.
Les Femmes Socialistes demandent au gouvernement de revoir sa position en la matière, et d’inscrire la prolongation du délai à 14 semaines dans une réforme législative. Nous plaidons également pour l’inscription du droit à l’avortement dans la Constitution, comme un signal fort en faveur des droits fondamentaux des femmes.
Refuser ce progrès, c’est perpétuer les inégalités et restreindre l’autonomie des femmes. Nous resterons mobilisées pour que chaque femme puisse disposer librement de son corps, sans contraintes inutiles ni injustices. Après le retrait du délai de réflexion ne serait-il pas temps de faire un pas de plus en soutenant les femmes dans leur prise de décisions autonomes au niveau de la prolongation du délai légal ?
Comité national des femmes socialistes
[1] https://lns.lu/departement/genetique/nipt/