Combattre la pauvreté, pas les pauvres!

Après avoir adopté l’interdiction générale de la mendicité dans le cadre d’une modification
du règlement de police de la capitale lors de sa séance du 27 mars 2023, le conseil communal
de la Ville de Luxembourg s’est vu confronté à un refus d’approbation par le ministère de
l’Intérieur (maintenant ministère des Affaires intérieures).

Le ministère de l’Intérieur vérifie en effet que le règlement communal est conforme aux
normes supérieures : nos lois nationales, notre Constitution et les traités internationaux. De
plus, le règlement ne doit pas aller à l’encontre de l’intérêt général.
En mai 2023 le ministère de l’Intérieur avait constaté que le règlement de police n’a pu être
approuvé que partiellement étant donné que l’article 42 relatif à l’interdiction de la
mendicité simple n’est pas conforme aux normes de droit supérieures.
Le ministère de l’Intérieur avait donné trois raisons à son refus :

1. un règlement de police ne peut comporter une interdiction que s’il existe un danger pour
l’espace public. Le ministère de l’Intérieur n’a trouvé aucune raison pour laquelle une
personne qui mendie représente un danger. Il n’y a donc pas de raison objective de
restreindre la liberté des personnes qui se trouvent dans l’espace public.
2. l’interdiction de la mendicité est contraire au droit international : dans un récent arrêt
(Lacatus c. Suisse) de la Cour européenne des droits de l’homme, il a été décidé qu’une
interdiction générale de la mendicité était contraire à la Convention des droits de l’Homme.
(Article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme).
3. le droit national : une commune ne peut pas aller plus loin que le législateur national
avec son règlement communal : Etant donné que le législateur a explicitement retiré la
mendicité simple du code pénal en 2018, ce règlement est contraire à l’abrogation du
législateur national. Depuis 2018, la mendicité simple a été explicitement supprimée du
code pénal, cela signifie donc concrètement que le législateur national ne veut punir que la
mendicité organisée.

Or, seulement sept mois après ce refus juridiquement fondé, le ministère des Affaires
intérieures, sous la supervision du nouveau ministre Léon Gloden, a décidé d’approuver le
règlement de police interdisant la mendicité simple.

Nous critiquons fermement cette décision, car il s’agit du même texte avec la
même interdiction et les arguments juridiques sont restés exactement les mêmes.
Comment se fait-il qu’un règlement communal qui n’était pas conforme à la loi il
y a 7 mois le soit maintenant, alors que les circonstances sont restées exactement
les mêmes ?
De plus, le nouveau ministre des Affaires intérieures Léon Gloden a indiqué hier dans une
interview sur RTL que “nous avons par ailleurs d’autres communes qui avaient également
prévu cette interdiction dans leur règlement de police, avant même que la ville de
Luxembourg ne le fasse, et là, cela a été approuvé par le ministère de l’Intérieur à l’époque”.
Cette affirmation est factuellement fausse, car ce n’est que depuis le 1er janvier 2023, que
toute modification du règlement de police doit être approuvée par le ministre des Affaires
intérieures.
Ces décisions, tant celles du Conseil échevinal DP-CSV que celles du nouveau
ministre de l’Intérieur CSV, prouvent avant tout qu’il s’agit de lutter à tout prix
contre les pauvres plutôt que de résoudre le problème de la pauvreté en soi. A
cela s’ajoute le fait qu’une politique aussi répressive ne peut pas résoudre les
défis sociaux tels que la pauvreté, les problèmes de santé et l’exclusion sociale
sans améliorer les mesures de prévention ou encore l’accompagnement social.
En interdisant la mendicité, c’est-à-dire en punissant une personne qui doit vivre dans la rue
et mendier en raison d’un coup du sort personnel, on accepte la stigmatisation de la pauvreté.

Communiqué par les Stater Sozialisten, le 12 décembre 2023

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